Promenade 2 |
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Textes de Michèle Blard, Deux pièces japonaises de Daniel Lifermann à la flûte shakuhachi Estampe originale de Valérie Prazeres. A paraître en octobre 2021 |
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Extraits des textes : | |||||
Roger, le cousin germain et son fouet ! Susciter un sanglier endormi dans une forêt lointaine. Le claquement de la cravache, sa percussion qui résonne entre la ferme et les sillons des blés déjà fauchés. Le petit bruissement, le ronron, le pépiement le plus léger portent loin en été ! Jusqu’à la sacristie, jusque dans l’intervalle entre le sentier et le sabot du cheval, jusque chez La Mère Filoche. Fuite paisible du tempo. Le grillon des champs, les heures qui sonnent deux fois on s’en fiche, les fous-rires lorsque nous enjambons les orties on n’aura même pas mal ! L’égarement fertile au bord du chemin, les friches, les prairies, les criquets, les sauterelles et nous en étions !
Michèle Blard, extrait de "suite orchestrale" |
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J’ai voulu entrer dans la chambre du bas, la chambre de notre amour, et il n’était plus là. La veille, j’avais oublié de vérifier qu’Il ingérait devant moi cette molécule camisole censée atténuer ses voix à lui, celles qui le harcelaient, ces voix autres surgies de je ne sais quel recoin de sa douleur. Je m’étais endormie dans mon bureau, au premier étage, épuisée par les heures à veiller sur la maladie. Oubliées la pipette et les gouttes à compter dans un verre d’eau, dissoute, dans quelques secondes de relâche, la psychose qui métamorphosait mon amoureux en monstre, transformait le confinement en film d’horreur...
Isabelle Brocard extrait de "Hurler, entendre les pigeons sur le toit et chanter Hallelujah" |
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C’est sûrement dimanche. Fin d’après-midi, début de soirée ? L’air fraîchit déjà. La nuit tombera vite, on le devine. Mais je n’ai rien à craindre. Je suis entièrement recouverte de peaux de lapins. Cousues les unes aux autres, ça fait un drôle de manteau, un peu raide, un peu trop grand, qui laisse à peine émerger mon visage. Mais qu’importe. Il n’y a rien à voir. Devant moi, à quelques centimètres, obstruant toute vision, son dos. Large, imposant. Exactement comme son coup de pédale. Exactement comme son vélo à freins tambours. Solide. Efficace. Je trône à l’arrière dans un siège d’osier, les pieds retenus par des cale-pieds, les mains accrochées à la selle. Le dos du père coupe le vent. Rien ne siffle à mes oreilles. Et surtout pas la mélodie familiale des visites obligées, la litanie des oncles et tantes auxquels il faut réciter des poésies. Voici le meilleur instant , l’heure du retour à la maison, la ballade du silence sur les pavés de banlieue.
Françoise Ascal extrait de "Raga - Années cinquante"
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